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LE 9.08.2020: Actualité de l'astronomie / Le calcium de nos os provient d'explosions d'étoiles très rares.

Le calcium de nos os provient d'explosions d'étoiles très rares

 

 

Nathalie Mayer

Journaliste

 

 

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Le calcium est le constituant principal de nos os et de nos dents. Produit par les étoiles, il est ensuite dispersé dans l'Univers. Et notamment lors d'explosions stellaires rares. Tellement rares qu'elles restaient, pour les astronomes, extrêmement mystérieuses. Mais, aujourd'hui, une équipe dévoile quelques-uns des secrets de ces supernovae riches en calcium.

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L'oxygène, le carbone ou encore l'azote qui entrent dans la composition de nos cellules sont nés au cœur des étoiles. Et même le calcium essentiel à nos os. Tous ces éléments ont ensuite été éjectés dans l'espace par de violentes explosions d’étoiles en supernovae. Certaines d'entre elles sont qualifiées par les astronomes de supernovae riches en calcium. Mais elles restent rares. D'où la difficulté jusqu'alors pour les chercheurs à expliquer l'abondance en calcium observée dans notre Voie lactée, par exemple.

Aujourd'hui, des travaux menés dans plusieurs observatoires à travers le monde par une équipe de 70 scientifiques pourraient bien éclairer le problème d'une lumière nouvelle. Car, pour la première fois, des chercheurs ont pu observer aux rayons X une supernova riche en calcium, baptisée SN 2019ehk. « Aucune théorie n'avait imaginé que ces phénomènes pourraient s'accompagner d'une émission X », note Raffaella Margutti, astronome à l'université Northwestern (États-Unis), dans un communiqué de l’université de Californie.

De quoi offrir un aperçu unique du dernier mois de vie de l'étoile et de son ultime explosion. La relative proximité de la supernova -- située dans la galaxie M100 (NGC 4321), à environ 55 millions d'années-lumière de notre Voie lactée -- et la possibilité de l'observer en parallèle avec le télescope spatial Hubble leur ont aussi permis d'accéder à des données très précises et nouvelles.

Après l’explosion, la supernova SN 2019ehk apparaît distinctement sur les images du télescope spatial Hubble. © Charlis Kilpatrick, Université de Californie, à Santa Cruz

Après l’explosion, la supernova SN 2019ehk apparaît distinctement sur les images du télescope spatial Hubble. © Charlis Kilpatrick, Université de Californie, à Santa Cruz 

Une étoile compacte et une éjection de gaz préalable

En mobilisant les moyens de l'observatoire W. M. Keck (Mauna Kea, Hawaï), les astronomes ont pu noter que SN 2019ehk avait en fait émis la plus grande quantité de calcium jamais observée pour un événement singulier. Selon eux, l'étoile avait, pendant les dernières étapes de sa vie, éjecté une fine couche externe de gaz. Et lorsque l'étoile a explosé, sa matière est entrée en collision avec cette couche de gaz, émettant d'intenses rayons X.

Comme si l’émission de carbone calmait l’explosion

Finalement, les températures extrêmement chaudes ont permis d'enclencher des réactions chimiques qui ont mené à la production de calcium. Une production massive, donc. « Tout se passe comme si l'émission de calcium était un moyen efficace de calmer l'explosion », remarque Raffaella Margutti.

Les chercheurs se sont aussi tournés vers les images du télescope spatial Hubble. Depuis 25 ans qu'il observait M100, il n'avait jamais remarqué la présence de l'étoile responsable de SN 2019ehk. « Les données Hubble d'avant l'explosion sont incroyablement profondes, nous aurions donc vu n'importe quel type d'étoile sur le site de la supernova à moins qu'elle ne soit presque aussi petite que le soleil ou quelque chose d'encore plus petit, comme une naine blanche », précise Charlie Kilpatrick, chercheur à l'université de Californie. De quoi permettre aux astronomes de préciser un peu plus la nature des étoiles à l'origine de ces supernovae riches en calcium.

POUR EN SAVOIR PLUS

L'énigme des supernovae riches en calcium s'éclaircit

Les supernovae sont traditionnellement réparties en deux grandes catégories : les SN I et les SN II. Mais, au fil des observations, de nouvelles sous-divisions se créent, avec parfois des caractéristiques exotiques, comme des éjectas anormalement riches en calcium. Certaines de ces supernovae résulteraient en fait de collisions de deux naines blanches éjectées de galaxies par deux trous noirs supermassifs sur le point de fusionner.

Article de Laurent Sacco paru le 25/08/2015

Ces images du télescope spatial Hubble montrent des galaxies elliptiques avec des supernovae riches en calcium. SN 2000D (à gauche) est située à au moins 12.000 années-lumière de sa galaxie, NGC 2768. Quant à SN 2005cz (à droite), elle est à au moins 7.000 années-lumière de sa galaxie, NGC 4589. NGC 2768 se trouve à 75 millions d'années-lumière de la Voie lactée, et NGC 4589 à 108 millions d'années-lumière. © Nasa, Esa, and P. Jeffries and A. Feild (STScI)

Ces images du télescope spatial Hubble montrent des galaxies elliptiques avec des supernovae riches en calcium. SN 2000D (à gauche) est située à au moins 12.000 années-lumière de sa galaxie, NGC 2768. Quant à SN 2005cz (à droite), elle est à au moins 7.000 années-lumière de sa galaxie, NGC 4589. NGC 2768 se trouve à 75 millions d'années-lumière de la Voie lactée, et NGC 4589 à 108 millions d'années-lumière. © Nasa, Esa, and P. Jeffries and A. Feild (STScI) 

La théorie de la nucléosynthèse stellaire a révolutionné notre compréhension de l'origine chimique des éléments au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Elle nous a appris que les noyaux d'oxygène, de carbone et d'azote composant nos cellules ont été produits au cœur des étoiles puis éjectés dans l'espace interstellaire par des explosions d'étoiles - des supernovae. Ces noyaux vont à leur tour se retrouver dans des nuages moléculaires et poussiéreux où naîtront, par effondrement gravitationnel, d'autres étoiles accompagnées d'un disque protoplanétaire puis d'un cortège d'exoplanètes.

La cosmochimie de notre galaxie évolue donc sans cesse depuis des milliards d'années avec un taux d'éléments lourds qui ne cesse de croître. Il reste encore beaucoup à faire pour comprendre finement cette évolution. On ne comprend pas très bien, par exemple, d'où vient le calcium de nos os car les calculs prédisant l'abondance des noyaux de cet élément dans notre Voie lactée aboutissent à des chiffres trop faibles. Ne serait-ce que pour cette raison, les astrophysiciens ont donc été intrigués quand ils ont découvert des supernovae comme SN 2005E qui étaient moins lumineuses que celles connues jusqu'à présent mais dont les restes des explosions semblaient particulièrement riches en calcium.

Des supernovae extragalactiques

Plusieurs de ces supernovae riches en calcium sont atypiques pour d'autres raisons. Elles ont en effet été découvertes à plusieurs dizaines de milliers d'années-lumière des galaxies. Elles n'appartiennent pas à des galaxies naines ni des amas globulaires comme on pouvait le soupçonner de prime abord. Enfin, elles se sont produites avec des astres possédant des vitesses particulièrement grandes - de l'ordre de 7 millions de kilomètres par heure. L'ensemble de ces caractéristiques semblait paradoxal et plutôt énigmatique.

L'astrophysicien Ryan Foley, de l'université de l'Illinois, à Urbana-Champaign, aux États-Unis, a utilisé des images archivées provenant des observations de Hubble pour tenter d'y voir plus clair. Il a exposé ses conclusions dans un article publié dans les célèbres Monthly Notices of the Royal Astronomical Society (MNRAS) et disponible sur arXiv.

Ce schéma représente le modèle explicatif proposé pour rendre compte de l'existence des supernovae extragalactiques riches en calcium. Il fait intervenir des collisions de galaxies contenant des trous noirs supermassifs en leur centre (1). Une étoile double composée de deux naines blanches est alors éjectée (3) avant de produire la supernovae en question (6). Toutes les explications dans le texte ci-dessous. © Nasa, Esa, P. Jeffries, A. Feild (STScI)

Ce schéma représente le modèle explicatif proposé pour rendre compte de l'existence des supernovae extragalactiques riches en calcium. Il fait intervenir des collisions de galaxies contenant des trous noirs supermassifs en leur centre (1). Une étoile double composée de deux naines blanches est alors éjectée (3) avant de produire la supernovae en question (6). Toutes les explications dans le texte ci-dessous. © Nasa, Esa, P. Jeffries, A. Feild (STScI) 

Des collisions de galaxies contenant des trous noirs supermassifs

Selon le chercheur, les vitesses et les trajectoires des astres ayant explosé en supernovae sont très similaires à celles des étoiles qui, étant passées trop près du trou noir supermassif de la Voie lactée, se sont retrouvées éjectées à grandes vitesses. Les analyses des données concernant 13 supernovae riches en calcium montrent qu'elles sont souvent associées à des galaxies elliptiques en train de fusionner ou qui l'ont fait récemment à l'échelle de l'âge de l'univers observable. On sait que la majeure partie des galaxies contiennent des trous noirs supermassifs et que lorsqu'elles fusionnent, les trous noirs le font aussi.

Avant cet événement, qui devrait s'accompagner d'une émission particulièrement copieuse d'ondes gravitationnelles, les deux trous noirs, en migrant vers le cœur de la galaxie nouvellement formée, vont entraîner chacun avec eux un cortège d'étoiles. Ryan Foley pense que ce phénomène va éjecter un plus grand nombre d'étoiles par effet de fronde gravitationnelle. Alors que dans le cas de notre galaxie, environ une étoile par siècle va être catapultée dans le milieu intergalactique, dans le cas d'une collision avec une autre galaxie, on atteindrait un taux de 100 étoiles par an !

 

Des réactions de synthèse du calcium problématiques

L'astrophysicien pense que parmi ces étoiles, celles qui vont donner lieu à des supernovae riches en calcium dans le milieu intergalactique sont des étoiles binaires un peu particulières. Il s'agirait de naines blanches en orbite l'une autour de l'autre. Du fait de l'éjection par les deux trous noirs supermassifs, ces systèmes stellaires doubles (voir 1-2-3 sur le schéma ci-dessus) évolueraient plus rapidement, en quelques dizaines de millions d'années plutôt qu'en une dizaine de milliards d'années au minimum et même plus. C'est-à-dire que leurs orbites vont diminuer de taille plus rapidement qu'elles ne devraient le faire, de sorte que les forces de marée vont augmenter tout aussi rapidement entre les deux astres compacts. L'une de ces étoiles va finir par arracher de la matière à l'autre qui, en s'accrétant, va déclencher une explosion thermonucléaire (voir 4-5-6 sur le schéma ci-dessus) avant que les deux n'entrent en collision, comme c'est le cas pour certaines SN Ia.

Si Ryan Foley a raison, cela ne résout toutefois qu'une partie de l'énigme des supernovae riches en calcium. En effet, de ce que l'on croit comprendre, les réactions de nucléosynthèse associées aux étoiles devenant des supernovae conduisent à des noyaux de fer et de nickel au dépend de la production de ceux de calcium. Or, dans le cas des supernovae riches en calcium, quelque chose semble interférer avec ces réactions de synthèse de sorte que l'on trouve cinq fois plus de noyaux de calcium dans les restes de ces explosions de naines blanches et beaucoup moins de fer que pour les supernovae standard.

 

 

 

 

Source: https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/supernova-calcium-nos-os-provient-explosions-etoiles-tres-rares-59432/#utm_content=futura&utm_medium=social&utm_source=facebook.com&utm_campaign=futura

 

 

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