Vénus est considérée comme la jumelle maléfique de la Terre. Située par moments à “seulement” 40 millions de kilomètres, notre plus proche voisine a été formée dans la même région du Système solaire et possède quasiment la même composition, la même taille et la même densité que notre planète. Mais les similitudes s'arrêtent là. La température atteint en effet 470°C en surface, une véritable fournaise ! Et la pression atmosphérique est littéralement écrasante, puisqu'elle dépasse 90 bars (essentiellement du dioxyde de carbone), l'équivalent de ce qu'on ressentirait sous l'eau à 900 mètres de profondeur. Une autre différence remarquable concerne la vitesse des vents et la circulation de l'atmosphère. Sur Vénus, cette dernière se déplace en effet beaucoup plus vite que la planète elle-même. Il ne lui faut ainsi que 4 jours terrestres pour effectuer un tour complet, alors que la surface en met 243 !
Un phénomène identifié dès les années 1960
Dénommé “super-rotation”, “ce phénomène ne s’observe chez aucune autre planète du Système solaire”, rappelle Sébastien Lebonnois, chercheur au Laboratoire de météorologie dynamique à Sorbonne Université. “Sur Terre, des vents comme les alizés soufflent certes dans un sens ou un autre en fonction des latitudes, mais le mouvement global est quasiment nul, détaille l’expert. L’atmosphère terrestre se déplace ainsi de 1 à 1,5% plus vite que la surface, sans commune mesure avec ce qu’on observe sur Vénus.” Identifiée dès les années 1960, le phénomène de super-rotation résistait cependant à la sagacité des scientifiques. “Aucun modèle, aucun canevas théorique n’arrivait à le décrire et l’expliquer complètement”, explique Sébastien Lebonnois.
La pièce manquante du puzzle
Les chercheurs buttaient, en particulier, sur les mécanismes permettant de transporter de grandes quantités d’énergie au niveau de l’équateur, où l’atmosphère est propulsée à très grande vitesse d’est en ouest. Il manquait ainsi une pièce au puzzle, mais laquelle ? Elle a été fournie par la sonde japonaise Akatsuki, qui orbite autour de Vénus depuis 2015 et scrute son atmosphère avec des caméras infrarouges et un imageur ultraviolet notamment. Et ces instruments ont permis de décrire, au sommet des nuages à 70 kilomètres d’altitude, les vents et les transports d’énergie avec une précision jamais atteinte auparavant.
La sonde japonaise Akasuki qui orbite autour de Vénus depuis 2015.
Le côté “jour” de Vénus
Fort de ces nouvelles informations, une équipe dirigée par Takeshi Horinouchi, de l’université d’Hokkaido au Japon, a mis en évidence un élément clé : la preuve que les “marées thermiques” jouaient un rôle essentiel et jusqu’ici insoupçonné dans la super-rotation. Les marées thermiques sont des ondulations générées dans l’atmosphère lorsque le Soleil chauffe le côté “jour” de Vénus. Or les chercheurs japonais ont découvert que ces ondulations transportaient l’énergie des vents, non seulement de manière verticale, des hautes vers les basses altitudes comme certains modèles le suggéraient, mais surtout horizontalement des pôles vers les régions équatoriales, ce qui était totalement inattendu. Au sommet des nuages, là où les vents sont les plus rapides, les marées thermiques participent donc fortement à l’accélération des vents à l’équateur, qui atteignent ainsi 400 km/h. “Il reste encore à mesurer et analyser ce qui se passe au-dessous des plus hauts nuages, inaccessible aux « yeux » d’Akatsuki et qui nécessiterait une sonde de rentrée atmosphérique, précise Sébastien Lebonnois. Mais grâce à ces travaux, une étape cruciale a été franchie.”
Les différents mécanismes et contributions qui maintiennent la super-rotation de Vénus.
Source: sciencesetavenir.fr
Source: https://www.sciencesetavenir.fr/espace/planetes/la-super-rotation-de-venus-enfin-expliquee_144562