LE 21.03.2020 Actualité de l'Astronomie / Une supernova aurait causé l’extinction de masse au Dévonien il y a 360 millions d’années.
- Par dimitri1977
- Le 21/08/2020 à 09:37
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Une supernova aurait causé l’extinction de masse au Dévonien il y a 360 millions d’années
Laurent Sacco
Journaliste
La Terre a connu plusieurs extinctions de masse, dont certaines ont été causées par des impacts d'astéroïdes ou par des éruptions volcaniques majeures. Celle du Dévonien pourrait avoir été provoquée par une disparition momentanée de la couche d'ozone, disparition produite par l'explosion d'une supernova très proche du Système solaire dans la Voie lactée.
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Si un jour vous visitez la Gaspésie, une région du Québec donnant sur l'Atlantique Nord, ne manquez pas l'occasion d'aller visiter le parc de Miguasha, c'est l'un des plus importants sites paléontologiques de la Terre et, depuis 1999, c'est un site naturel du Patrimoine mondial de l'Unesco. Les fossiles qu'on y trouve dans les archives sédimentaires de la Formation d'Escuminac datent du Dévonien, il y a environ 380 millions d'années, au moment où la Vie dans les océans allait prendre une nouvelle dimension en préparant les ancêtres des premiers vertébrés qui allaient explorer les continents.
Rappelons que le Dévonien est une période géologique s'étendant de -419 à -358 millions d'années environ. Son stratotype - l'affleurement qui sert de référence pour définir un étage géologique, c'est-à-dire un étage de l'échelle stratigraphique - se trouve dans le Devonshire en Angleterre. Une visite au musée de Miguasha ne pourra que vous confirmer que le titre « âge des poissons » décerné au Dévonien est bien justifié, tant les poissons ont atteint une diversité substantielle pendant cette période.
Situé dans la région du Québec méridional, sur la côte sud-ouest de la péninsule gaspésienne, le parc national de Miguasha est un site paléontologique remarquable, considéré comme la meilleure illustration de la période du Dévonien ou « âge des poissons ». Datée de 380 millions d'années, la formation d'Escuminac, Dévonien supérieur, renferme cinq des six groupes de poissons fossiles associés à cette période. L'importance de ce site tient au fait qu'on y trouve la plus grande concentration de spécimens fossiles de poissons à nageoires charnues – en état exceptionnel de conservation – qui sont les ancêtres des premiers vertébrés terrestres respirant de l'air : les tétrapodes. © Les Productions Rivard
Une couche d'ozone détruite à l'âge des poissons
Mais pour les paléontologues, le Dévonien c'est aussi un mystère car il a visiblement été marqué par l'une des cinq extinctions massives de la vie animale et végétale enregistrées au cours de l'histoire de la vie sur Terre. Cette crise biologique est complexe, elle semble se produire en trois fois sur une durée d'environ 20 millions d'années et c'est pourquoi plusieurs causes ont été évoquées. L'une d'elles, comme l'expliquait Futura dans le précédent article ci-dessous, fait intervenir la disparition de la couche d'ozone de notre Planète bleue.
Ce qui semble acquis en tout cas, c'est que cette extinction du Dévonien aboutit à la disparition de 19 % des familles et de 35 à 50 % des genres d'animaux marins, soit au total 75 % des espèces animales qui s'évanouissent de la biosphère il y a entre -380 et -360 millions d'années environ. Mais, voilà qu'aujourd'hui une équipe de chercheurs menée par Brian Fields, professeur d'astronomie et de physique à l'université de l'Illinois, Urbana-Champaign, vient de publier un article en accès libre sur arXiv qui pousse un cran plus loin l'hypothèse d'une disparition de la couche d'ozone pour la crise biologique du Dévonien.
Le nom Miguasha est d'origine Micmac, cette nation qui habitait autrefois la Gaspésie. À l'époque, ils appelaient le site « Megouasag », voulant dire « falaises rouges ». La partie supérieure des falaises est en effet de coloration rouge due à la formation géologique de Bonaventure, beaucoup plus récente que la formation d'Escuminac qui est le centre d'intérêt pour les scientifiques et visiteurs à Miguasha. C'est au médecin Abraham Gesner qu'on associe la découverte de la richesse fossilifère de Miguasha. Gesner a découvert plusieurs fossiles qu'il a décrits dans son rapport publié en 1843. La période du Dévonien est surnommée « l'âge des poissons » parce que la majorité des évènements évolutifs identifiés par les paléontologues concernent l'évolution des poissons, incluant l'extinction ou l'apparition de certaines espèces et la diversification de différents groupes de poissons encore présents aujourd'hui. Le site de Miguasha est d'une importance capitale, car il occupe le premier rang mondial pour le nombre et la qualité de conservation des spécimens fossiles des premiers vertébrés terrestres à quatre pattes. © Les Productions Rivard
Comme l'expliquait Futura, on sait que l'on trouve à la limite Dévonien-Carbonifère des roches sédimentaires qui gardent la mémoire fossilisée des centaines de milliers de générations de spores végétales qui semblent avoir été brûlées par les UV du Soleil, ce qui est la preuve d'un événement d'appauvrissement de la couche d'ozone de longue durée. Mais quelle serait la cause d'une telle déplétion ?
Des supernovae en série à 65 années-lumière du Soleil ?
Pour Brian Fields, comme il l'explique dans un communiqué de l'université de l'Illinois : « Les catastrophes terrestres telles que le volcanisme à grande échelle et le réchauffement climatique peuvent également détruire la couche d'ozone, mais les preuves de celles-ci ne sont pas concluantes pour l'intervalle de temps en question. Au lieu de cela, nous proposons qu'une ou plusieurs explosions de supernova, à environ 65 années-lumière de la Terre, auraient pu être responsables de la perte prolongée d'ozone ». Coautrice de l'article publié, la doctorante Adrienne Ertel ajoute que : « Pour mettre cela en perspective, l'une des menaces de supernova les plus proches aujourd'hui vient de l'étoile Bételgeuse, qui est à plus de 600 années-lumière et bien en dehors de la distance de destruction de 25 années-lumière ».
Une supernova proche du Système solaire ne ferait pas qu'inonder très temporairement la Terre et sa biosphère dans un flot délétère pour les molécules d'ozone et d'ADN de rayons X et gamma. Le flux de rayons cosmiques sous forme de particules chargées accélérées par les ondes de choc de l'explosion, notamment des noyaux radioactifs, serait bien plus pérenne, s'étendant sur une durée pouvant atteindre 100.000 années.
Cependant, pour recouper le fait que l'on constate un déclin étalé de la biodiversité menant à l'extinction du Dévonien-Carbonifère, il faudrait sans doute faire intervenir plusieurs explosions rapprochées de supernova. Cela peut paraître très improbable mais ce serait oublier que les supernovae de type SN II se produisent avec des étoiles massives évoluant en quelques millions d'années et qui naissent en même temps dans des pouponnières donnant des amas ouverts d'étoiles.
Il existe un moyen de tester cette hypothèse. Il faudrait retrouver des traces d'isotopes radioactifs bien particuliers dans les sédiments de la fin du Dévonien, des isotopes comme le plutonium-244 et samarium-146 qui ne peuvent être synthétisés que lors de l'explosion d'une supernova.
CE QU'IL FAUT RETENIR
- Il y a environ 360 millions d'années, à la fin du Dévonien, une des plus importantes crises biologiques de la biosphère s'est produite.
- Des fossiles de plantes suggèrent qu'elle a été accompagnée et probablement en partie au moins causée par la disparition de la couche d'ozone protectrice des ultraviolets pendant une certaine durée.
- La destruction de la couche d'ozone ne semble pouvoir s'expliquer que par l'explosion d'une et même plusieurs supernovae à environ 65 années-lumière du Système solaire.
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