Le 15.06.2018:Intempéries du 21 mai au 12 Juin 2018 : une mousson à la française ?
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- Le 15/06/2018 à 10:55
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Trombes d’eau, pluies diluviennes, orages violents, coulées de boue, inondations, grêle…autant de phénomènes météo qui se sont répétés presque quotidiennement entre le 21 mai et le 12 juin. Notre climat se détraque-t-il ? La France se tropicalise-t-elle ? Est-ce lié au changement climatique ? La Chaîne Météo vous apporte quelques éléments de réponses…
Une situation météo atypique
Pendant 3 semaines, la situation météo a été atypique sur le continent européen. Une situation de blocage s’est mise en place avec un anticyclone puissant vissé sur l’Europe du nord tandis qu’un vaste système dépressionnaire concernait le golfe de Gascogne, la péninsule ibérique et le sud de la France. Habituellement à cette période de l’année, l’anticyclone des Açores commence à s’étendre vers le sud de la France et la Méditerranée alors que les dépressions et perturbations circulent sur une large moitié nord de l’Europe. Cette inversion des centres d’action n’est pas inédite au printemps mais c’est la durée du phénomène (3 semaines) qui est exceptionnelle.
A l’échelle de la France, un conflit de masse d’air s’est opéré entre de l’air frais arrivant par le proche Atlantique et de l’air plus chaud venant de Méditerranée et d’Europe centrale. Ainsi, au cours de cette période, il a fait beaucoup plus chaud dans le nord-est que dans le sud-ouest. A Strasbourg la température maximale moyenne du 21 mai au 12 juin a été de 27° contre 21,5° à Biarritz ! Ce contraste de masses d’air est l’un des facteurs expliquant la situation météo très instable et orageuse que nous avons subi. A cela s’est ajouté un gros contraste de températures entre le sol et l’altitude avec la récurrence de « gouttes froides », poches d’air froid à -15° vers 5000 mètres d’altitude alors que la température moyenne au niveau du sol était de 24°C les après-midi. Or plus le contraste de températures est important entre le sol et l’altitude et plus l’instabilité de la masse d’air est importante.
Des orages stationnaires porteurs de pluies diluviennes
Au cours de cette période d’intempéries, la France s’est retrouvée régulièrement dans une situation de marais barométrique avec très peu de différences de pression d’une région à l’autre. Cette situation sans flux notoire n’a donc pas favorisé la circulation des cellules orageuses qui sont parfois restées au même endroit pendant plusieurs heures…Compte tenu de la forte intensité des pluies, les cumuls de précipitations ont été très importants avec parfois plus d’un mois de pluie en quelques heures seulement. Dans les zones rurales, des coulées de boue se sont produites en raison des pluies intenses qui n’ont pas eu le temps d’être absorbées par les terrains agricoles, notamment sur les versants en pente. Certains villages ont donc été littéralement envahis par des torrents de boue à l’origine de dégâts aux habitations.
En zone urbaine, c’est la forte imperméabilisation des sols qui est à l’origine de ruissellements importants avec des réseaux d’évacuation des eaux pluviales qui sont souvent insuffisants lorsque se produisent les plus fortes pluies orageuses. Ainsi, en l’espace de quelques minutes, certaines voies urbaines peuvent se transformer en rivières ou torrents d’eau qui deviennent dangereux pour les automobilistes et viennent inonder les habitations.
Dimanche 3 juin, Morlaix a reçu 52 millimètres en une heure soit presqu’un mois de pluie. Un véritable torrent d’eau et de boue a déferlé sur la ville, les dégâts ont été très importants.
La rue de Paris sous l'eau à #Morlaix ce soir. Vidéo Michel Cren #meteo #Orages #Bretagne cc @KeraunosObs @MeteoBretagne
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Des records de foudroiement
Si quelques orages se sont déclenchés dès la première décade de mai dans le sud et l’est du pays, c’est au cours de la troisième décade que les orages ont été les plus nombreux et fréquents touchant la plus grande partie du territoire. Ce mois de mai 2018 est au final de loin le plus foudroyé de ces 30 dernières années avec 204 000 impacts de foudre pulvérisant l’ancien record de mai 2009 où Météorage avait enregistré 84000 impacts. A noter que la journée du 28 mai a été la plus orageuse avec 33759 impacts.
Une perturbation très active et des records de pluie les 11 et 12 juin
Les 11 et 12 juin, une dépression vient se creuser à 1006 hPa sur le Val de Loire. Autour de ce centre dépressionnaire une perturbation active s’organise. En météo on parle de « retour d’occlusion » avec des précipitations soutenues et durables sur un axe allant des Pays-de-la-Loire aux Ardennes en passant par la région parisienne. Cette zone de pluie se trouve coincée pendant plusieurs heures ; elle est liée à un conflit entre l’air chaud et instable qui remonte de Méditerranée et l’air plus frais qui descend des Iles Britanniques.
En une journée, on recueille 70 mm de pluie à Nantes, 75 mm à Orly et 78 mm à Paris ce qui correspond à un mois et demi de précipitations et constitue des records de pluie en 24h pour un mois de juin. Le cumul de pluie maximum est enregistré à Torcy en Seine-et-Marne avec 108 mm soit l’équivalent de 2 mois de pluie en 24h. Ces pluies orageuses durables et intenses provoquent une nouvelle fois des coulées de boue et inondations. L’autoroute A 13 est inondée dans les Yvelines entre Orgeval et Les Mureaux avec une circulation totalement interrompue dans la journée du 12 juin. Dans l’Essonne, une rame du RER déraille à Courcelles-sur-Yvette suite à un effondrement du talus de la voie ferrée, faisant 7 blessés légers.
#A13 Autoroute inondée dans les 2 sens dans les #Yvelines. Circulation interrompue. Trafic fortement perturbé. Évitez le secteur
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107.7 FM
http://www.sanef1077.fr #VigilanceOrange #inondations
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Le 13 juin, si le temps redevient calme sur la partie nord du pays, la perturbation active gagne le sud-ouest du pays avec des pluies soutenues et durables à proximité des Pyrénées. La ville de Pau recueille 91 mm en 24 heures et bat elle aussi un record de pluie datant du 9 juin 2000. Les rivières pyrénéennes subissent une crue importante et des débordements se produisent en Béarn et Bigorre.
Cet évènement est-il une marque du changement climatique ?
Un évènement météorologique pris isolément ne peut être directement relié au changement climatique. En regardant dans les archives météorologiques, on retrouve des évènements de pluie très intense liés aux orages. Lorsque l’on prend la station de Paris-Montsouris qui possède des relevés météo fiables depuis 1873, on voit que si un tel évènement pluviométrique ne s’était jamais produit en juin, un évènement orageux plus intense s’était produit le 6 juillet 2001 avec 104 mm recueilli en 24 heures.
En ce qui concerne les records de foudroiement, impossible de dire s'il s'agit de la marque du changement climatique car on a peu de recul avec seulement une trentaine d’années de statistiques. De plus ce premier semestre 2018 très foudroyé fait suite à une année 2017 qui a été la plus faible en matière d’impacts de foudre.
Ce que l’on observe ces dernières années, ce sont des situations de blocage et des flux méridiens plus fréquents et plus durables alors que les flux d’ouest océaniques sont un peu moins fréquents. Cela se traduit par de plus grandes fluctuations climatiques (printemps 2016 très arrosé, temps très sec en 2017, très humide au premier semestre 2018…). Il faudra voir si cette tendance se poursuit et si ce n’est pas là un signe du changement climatique.
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