COMÈTE 

  • LE 17.05.2020: Actualité de l'astronomie / La sonde Solar Orbiter pourrait croiser la comète Atlas qui s'est brisée en morceaux.

    La sonde Solar Orbiter pourrait croiser la comète Atlas qui s'est brisée en morceaux

     

     

    Emma Hollen

    Journaliste scientifique

     

     

    Alors que tout espoir de parvenir à observer la comète Atlas semblait perdu, la possible rencontre de la sonde Solar Orbiter avec la queue de l'astre ravive l'enthousiasme des scientifiques.

     

    Le mois dernier, les astronomes amateurs se réunissaient à leur fenêtre, sur leur terrasse ou dans leur jardin dans l'espoir d'observer la comète Atlas, qui promettait d'être l'un des spectacles les plus éblouissants des nuits de printemps 2020. Malheureusement, ces attentes furent déçues lorsque la comète commença à se désintégrer, n'offrant plus que des miettes aux yeux des passionnés. Mais tout espoir n'est peut-être pas perdu, car il semblerait que les chemins de la sonde Solar Orbiter et de la comète Atlas soient voués à se croiser.

    Une rencontre au sommet

    Lancée depuis cap Canaveral le 10 février 2020, Solar Orbiter est le fruit d'une collaboration entre l'ESA et la Nasa. Son objectif fou est de mesurer les vents solaires et d'analyser l'héliosphère, de partir en voyage d'observation aux pôles du Soleil, et aussi de rendre quelques visites à la planète Vénus au cours de ses 22 orbites autour du Soleil. Mais il se pourrait bien que la sonde se voit attribuer une nouvelle mission en plus de celles qui lui ont déjà été assignées. En effet, en comparant les trajectoires d'Atlas et de Solar Orbiter, les scientifiques Geraint Jones, Qaim Afghan et Oliver Price ont fait une découverte étonnante. « Nous prédisons que la sonde rencontrera la queue ionisée de la comète autour du 31 mai-1er juin 2020, et qu'elle traversera la queue de poussière le 6 juin 2020 », déclarent les chercheurs dans leur étude, parue sur le site de Research Notes of the AAS.

    Le noyau fragmenté de la comète Atlas photographié par Hubble les 20 et 23 avril 2020. © Nasa, ESA, STScI, D. Jewitt (Ucla)

    Bien que l'article n'ait pas bénéficié de la validation d'un comité de pairs, Geraint Jones n'en est pas à sa première comète. Il est en effet à la tête du projet Comet Interceptor, dont la mission est de parvenir à repérer et observer une comète dans son état le plus pur. « Toutes les comètes qui ont pu faire l'objet d'une rencontre avec une sonde sont de courte durée : ces objets ont déjà approché le Soleil à plusieurs reprises, et ont ainsi connu des changements à leur surface, dissimulant leur composition originelle », lit-on sur le site du projet. « Nous n'avons pas encore rencontré ni observé de comète véritablement pure. Ces objets sont difficiles à repérer car il ne peuvent réellement être découverts que lorsqu'ils s'approchent du Soleil pour la première fois, ne laissant que peu de temps pour planifier et lancer une mission dans leur direction. »

    Trajectoire prévue pour la sonde Solar Orbiter © S. Poletti/ESA

    Trajectoire prévue pour la sonde Solar Orbiter © S. Poletti/ESA 

     

    Rendez-vous cosmique

    La comète Atlas n'en sera certainement pas à son premier tour de manège au moment de sa rencontre avec Solar Orbiter, mais la perspective de cet événement n'en est pas moins enthousiasmante pour les scientifiques. Si la comète libère suffisamment de matière au moment fatidique, deux instruments sur la sonde seront capables de mesurer sa charge ionique et les perturbations magnétiques de son champ. « Si les instruments de Solar Orbiter détectent du matériel provenant de la comète Atlas, ce sera la première rencontre fortuite et prédite entre queue de comète et une sonde active dotée des instruments adaptés pour la détection de matériel cométaire », s'enhousiasme l'équipe de Geraint Jones. Rendez-vous à la fin du mois !

    Source: https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/comete-sonde-solar-orbiter-pourrait-croiser-comete-atlas-brisee-morceaux-81059/?fbclid=IwAR2YZ-6vRvzIsi5owGcYAf3UdvMpgpiqnMO4RtnrLXxLheKFjOVCvedxlto#utm_content=futura&utm_medium=social&utm_source=facebook.com&utm_campaign=futura

  • LE 14.05.2020: Actualité de l'astronomie / La comète Swan est passée au plus près de la Terre cette nuit et devient observable dans l'hémisphère nord.

    La comète Swan est passée au plus près de la Terre cette nuit et devient observable dans l'hémisphère nord

     

    Xavier Demeersman

    Journaliste

     

     

    Découverte le 11 avril, la comète Swan arrive dans les parages du Soleil. Elle semble promise à un destin brillant pour les semaines à venir, si tout va bien et qu'elle ne se brise pas en morceaux. Alors, tiendra-t-elle toutes ses promesses ? Comment l'observer ?

     

    Dernières nouvelles de la comète Swan (MAJ 13 mai 2020)

    Cette nuit du 12 au 13 mai, la comète Swan est passée au plus près de la Terre à quelque 85 millions de kilomètres. À noter qu'il est désormais possible de l'observer dans l'hémisphère nord, avant le lever du Soleil. Elle est encore très basse au-dessus de l'horizon mais on peut tenter de l'attraper du regard alors qu'elle traverse la constellation des Poissons (voir la carte de son parcours pour les prochains jours ci-dessous). Avec une magnitude de 5.5, elle est à la limite de la visibilité à l'œil nu. Si vous avez une paire de jumelles, vous pourrez discerner son noyau et une partie de sa chevelure.

    Xavi Bros@Xavi_Bros

    Here an incredible image of Comet C/2020 F8 (SWAN) taken by Gerald Rhemann. See the details in its tale.
    It starts its visibility from north hemisphere, low over the horizon but we dont know if it will be a naked eye object.

    Voir l'image sur Twitter

    Les récentes observations indiquent que sa luminosité tend à faiblir. La courbe de son éclat, malheureusement, s'aplatit et le rêve d'un show pour la fin mai, lors de son périhélie, s'éloigne. Au grand dam des astronomes amateurs, astrophotographes et de tous les curieux qui espéraient qu'elle remplace joliment la comète Atlas, pleine de promesses. Toutefois, nous devrions quand même pouvoir la distinguer à l'œil nu ces prochains jours.

    Robert Massey@RobertMMassey

    C/2020 F8 (SWAN) should definitely be on the naughty step. Out of interest, is it just fizzling, or is there any evidence of a breakup? (Also, reporters: please don't hype this one yet)

    Voir l'image sur Twitter

    MAJ du 9 mai 2020

    L'activité de C/2020 F8 Swan est au plus haut et culminera autour du 27 mai prochain, lorsqu'elle atteindra le point de son orbite hyperbolique le plus proche du Soleil.

    Sur cette superbe photo de la comète Swan prise dans le ciel de Namibie, on peut les effets perturbateurs du vent solaire sur la chevelure de l'astre glacé. © Gerald Rhemann

    Sur cette superbe photo de la comète Swan prise dans le ciel de Namibie, on peut les effets perturbateurs du vent solaire sur la chevelure de l'astre glacé. © Gerald Rhemann 

    Les astronomes amateurs et astrophotographes basés dans l'hémisphère sud rapportent plusieurs sursauts d'activité observés ces derniers jours. Tous sont médusés par la longueur impressionnante de sa chevelure (qui était aussi longue que 20 Pleine Lune mises côte-à-côte !). Les ardeurs du Soleil que l'astre glacé rencontre vraisemblablement pour la première fois a des effets bien visibles, de même que le vent solaire sur les panaches de gaz (voir image ci-dessous).

    Itinéraire de la comète Swan. © Sky & telescope

    Itinéraire de la comète Swan. © Sky & telescope 

    Si tout va bien et qu'elle ne se fragmente pas en de nombreux morceaux comme la comète Atlas -- qui est en train de s'éteindre --, son éclat devrait augmenter jusqu'à la magnitude 3 autour du 27 mai.

    Source: https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/comete-comete-swan-passee-plus-pres-terre-cette-nuit-devient-observable-hemisphere-nord-80890/?fbclid=IwAR0eTcRMzN6bYB7OLe8lpXvgAIh85oWOg59nBl0NVaPd_PReWUe2WwUnl10#utm_content=futura&utm_medium=social&utm_source=facebook.com&utm_campaign=futura

  • LE 29.04.2020: Actualité de l'astronomie / La comète Borisov a dégazé 230 millions de litres d’eau extrasolaire.

    La comète Borisov a dégazé 230 millions de litres d’eau extrasolaire

     

    Laurent Sacco

    Journaliste

     

     

     

     

    Le dégazage de la comète interstellaire 2I/Borisov a été observé par une batterie d'instruments, notamment le télescope en orbite Swift de la Nasa. Il a permis aux chercheurs d'estimer la quantité d'eau extrasolaire libérée lors de son passage dans le Système solaire.

     

    Le monde des exoplanètes nous fascine mais, malheureusement, même si une fraction de l'Humanité est occupée à développer un projet de sonde interstellaire via le projet Breakthrough Starshot, une nanovoile photonique propulsée par des faisceaux laser à destination des étoiles les plus proches du Soleil dans le système d'Alpha du Centaure, Homo sapiens en est encore à faire ses premiers pas hors de son berceau, la Terre, dans le Système solaire.

    Pourtant, de la matière issue d'un autre système planétaire est à sa portée depuis l'identification des premiers objets interstellaires traversant le Système solaire. Il y a d'abord eu le désormais légendaire 'Oumuamua qui n'était pas sans faire penser au scénario du roman d'Arthur Clarke Rendez-vous avec Rama et dont on pense qu'il est peut-être né au voisinage d'une naine rouge. Il y a maintenant la comète interstellaire 2I/Borisov.

    Une mission est envisagée pour tenter dans un avenir proche d'observer de plus près ces visiteurs interstellaires, et, pourquoi pas, en prélever des échantillons. Dans le cas de la comète 67P/Tchourioumov-Guérassimenko, l'astrochimiste, exobiologiste et planétologue Olivier Poch, nous a récemment expliqué que son étude jetait une lumière nouvelle sur l'origine de l'azote sur Terre, azote que la vie utilise de façon cruciale dans les protéines et l'ADN. Une mission à destination d'une cousine de 2I/Borisov pourrait donc se révéler très bavarde sur l'exobiologie et nous aider à comprendre à quel point la vie sur Terre est une rare occurrence dans une galaxie, ou non.

    Une présentation des découvertes faites avec Swift concernant 2I/Borisov. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa Goddard

    Swift, des sursauts gamma aux comètes

    En attendant, les instruments dont s'est déjà dotée la noosphère du géochimiste Vladimir Vernadsky et du géologue et paléontologue Pierre Teilhard de Chardin, l'esprit collectif en quelque sorte des Homo sapiens, nous permettent déjà de sonder les arcanes de la formation des systèmes planétaires et de la chimie prébiotique qu'ils hébergeraient en plongeant dans la composition de la coma de 2I/Borisov. Ce fut le cas ces derniers mois avec le télescope Hubble, le réseau de radiotélescope Alma et on l'apprend maintenant via une publication d'un article dans The Astrophysical Journal et que l'on peut consulter en ligne sur arXiv, avec l'observatoire Neil Gehrels Swift de la Nasa.

    Comme le rappelle la vidéo ci-dessous, Swift a été développé pour étudier les sursauts gamma, les explosions parmi les plus lumineuses de l'Univers. Mais il s'est avéré par la suite que les instruments qui équipaient ce satellite de la Nasa, et en particulier son télescope ultraviolet/optique (Uvot), pouvaient être utilisés dans d'autres domaines de l'astrophysique. Le planétologue états-unien Dennis Bodewits de l'Université Auburn en Alabama s'en sert depuis quelques années pour étudier les comètes.

    Avec ses collègues, notamment Zexi Xing en thèse à l'Université Auburn, il a donc obtenu du temps de télescope avec Swift pour prendre plusieurs clichés en ultraviolet de 2I/Borisov. Les chercheurs étaient notamment sur la trace des radicaux hydroxyles OH, des produits de la photodissociation des molécules d'eau dégazées de la comète par le rayonnement ultraviolet du Soleil. Rappelons que selon le fameux modèle de la « boule de neige sale » proposé par l'astronome Fred Whipple au début des années 1950, les comètes sont des petits corps célestes glacés contenant de la matière primordiale datant des premiers temps de la formation d'un système planétaire. Dans le cas du Système solaire, des centaines de milliards seraient « au congélateur » dans la ceinture de Kuiper et le nuage d’Oort à des milliards de kilomètres du Soleil.

    Une présentation des découvertes faites avec Swift. Pour obtenir une traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © Nasa Goddard

    230 millions de litres d’eau extrasolaire dégazés

    En tant que comète, 2I/Borisov devait également contenir de la glace d'eau, mais aussi en plus faible quantité de dioxyde de carbone (CO2).  Récemment, Hubble a permis de détecter également la présence en quantité atypique de monoxyde de carbone (CO) dans la chevelure de la comète à l'occasion de son dégazage sous l'effet du rayonnement chaud du Soleil, en particulier au plus proche de notre étoile. En combinant toutes les observations, on arrive finalement aujourd'hui à un premier portrait de 2I/Borisov que résume une déclaration de Zexi Xing : « Borisov ne s'intègre parfaitement dans aucune classe de comètes du Système solaire, mais elle ne se distingue pas exceptionnellement d'elles. Il existe des comètes connues qui partagent au moins une de ses propriétés ».

    Swift a permis de suivre la perte d'eau de la comète qui avait débuté à son approche à 370 millions de kilomètres du Soleil alors que 2I/Borisov fonçait à environ 161.000 kilomètres par heure sur une orbite hyperbolique sans retour à travers le Système solaire. Les astrophysiciens ont ainsi vu une augmentation de 50 % de la quantité d'hydroxyle - et donc d'eau - produite par Borisov entre le 1er novembre et le 1er décembre, à sept jours seulement de son passage au périhélie. Au pic de son dégazage, la perte d'eau s'élevait à 30 litres par seconde. Cumulée sur tout son temps d'activité la comète aurait libéré dans le Système solaire l'équivalent de 230 millions de litres d'eau extrasolaire. Toutefois alors qu'elle s'éloignait du Soleil, la perte d'eau de Borisov a chuté plus rapidement que n'importe quelle comète précédemment observée. Pour Zexi Xing, cela pourrait avoir été causé par une variété de facteurs comme un changement de rotation de la comète et même sa fragmentation qui a été mise en évidence fin mars.

    Toujours est-il que la perte d'eau a permis de préciser la taille de la comète dont on estime qu'elle est d'environ 0,74 kilomètre. Par contre, c'est au moins 55 % de sa surface qui se sublimait sous l'action des rayons du Soleil, ce qui est 10 fois la surface impliquée dans la majorité des comètes du Système solaire. Borisov leur ressemble néanmoins partiellement du point de vue chimique car Uvot a permis d'identifier des molécules comme C2 et l'amidogène dans environ 25 % à 30 % de toutes les comètes du Système solaire.

    Comète 2l/Borisov : quel est cet objet interstellaire ?  Dans ce petit film, nous vous racontons l’histoire de la comète interstellaire 2I/Borisov. Une histoire qui débute, pour nous Terriens, fin août 2019 quand nous l’avons croisée du regard pour la première fois, mais qui a commencé il y a des dizaines ou des centaines de millions d’années, voire même plus… car nous ne connaissons pas encore l'âge de cet objet venu d’ailleurs. 

    Source: https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/comete-comete-borisov-degaze-230-millions-litres-eau-extrasolaire-80783/?fbclid=IwAR2b6Mtzn9dIH3b0SxUafmrQceri0GR-wqr2eaQBOm6NRUXejZ7eaBy-eiI#utm_content=futura&utm_medium=social&utm_source=facebook.com&utm_campaign=futura

  • LE 25.04.2020: Actualité de l'astronomie / La comète interstellaire Borisov viendrait d'une étoile naine rouge.

    La comète interstellaire Borisov viendrait d'une étoile naine rouge

     

    Laurent Sacco

    Journaliste

     

     

    La chevelure de la comète interstellaire Borisov a été analysée avec le télescope Hubble et sa composition s'est finalement révélée atypique par rapport à celles des comètes nées dans le Système solaire. Son contenu en monoxyde de carbone laisse penser qu'elle s'est formée autour d'une étoile peu lumineuse, une naine rouge.

     

    Comète 2l/Borisov : quel est cet objet interstellaire ?  Dans ce petit film, nous vous racontons l’histoire de la comète interstellaire 2I/Borisov. Une histoire qui débute, pour nous Terriens, fin août 2019 quand nous l’avons croisée du regard pour la première fois, mais qui a commencé il y a des dizaines ou des centaines de millions d’années, voire même plus… car nous ne connaissons pas encore l'âge de cet objet venu d’ailleurs. 

    La nature exacte des comètes n'a commencé à être comprise que depuis quatre siècles. Le premier astronome qui a montré qu'il s'agissait de corps célestes voyageant bien au-delà de l'orbite lunaire a été le Bâtisseur du Ciel, Tycho Brahe. Mais, c'est à son futur collègue états-uniens, Fred Whipple, que l'on doit le premier modèle physique correct des comètes au début des années 1950. Elles y sont décrites comme des petits corps célestes glacés contenant de la matière primordiale datant des premiers temps de la formation du Système solaire et, pour partie d'entre elles, mises au congélateur dans la ceinture de Kuiper et le nuage d’Oort à des milliards de kilomètres du Soleil.

    Les comètes pouvaient donc être vues comme des mémoires, fidèles et inchangées, des conditions régnant dans le disque protoplanétaire à l'origine des planètes du Système solaire. Enfin, contenant de l'eau et de la matière organique, elles pouvaient avoir joué un rôle dans l'apparition de la vie sur Terre en apportant, par leur bombardement intense il y a des milliards d'années, tous les éléments d'une chimie prébiotique. On comprend donc aisément que plusieurs missions destinées à l'étude des comètes, et surtout au retour sur Terre du matériau cométaire, aient été réalisées ces dernières années ; la plus spectaculaire étant la mission Rosetta.

    L'astronome Fred Whipple. © Smithsonian Astrophysical Observatory

    L'astronome Fred Whipple. © Smithsonian Astrophysical Observatory 

    Les comètes, la mémoire de la formation planétaire

    Or, voilà qu'a été récemment découverte l'existence d'au moins une comète interstellaire formée dans un autre système planétaire et qui traverse en ce moment même notre Système solaire. Il s'agit de la comète 2I / Borisov baptisée en l'honneur de son découvreur à la fin de l'été dernier par le chasseur de comètes Gennadiy Borisov, en Crimée. Elle s'est approchée près du Soleil vers la fin du mois de décembre 2019 et elle s'en éloigne depuis.

    Ce fut l'occasion d'étudier plus précisément sa composition à l'aide du télescope Hubble et du réseau de radiotélescope Alma. Il s'agissait en effet d'une opportunité extraordinaire pour faire progresser la cosmochimie dans ce qu'elle peut nous apprendre sur la formation des exoplanètes et donc aussi l'exobiologie. On pouvait tenter de mieux répondre à des questions concernant le caractère unique ou non de notre Système solaire et donc aussi sur la fréquence des conditions favorables à l'apparition de planètes, comme la Terre, pouvant héberger la vie.
     

    La comète 2I / Borisov, photographiée avec le télescope spatial Hubble de la Nasa, une des photos montrant une galaxie (à gauche), est le deuxième objet interstellaire connu pour être entré dans notre Système solaire après le désormais célèbre 'Oumuamua. Une nouvelle analyse de la coma brillante et riche en gaz de Borisov indique que la comète est beaucoup plus riche en monoxyde de carbone qu'en vapeur d'eau, une caractéristique très différente des comètes de notre Système solaire. © Nasa, ESA et D. Jewitt (UCLA)

    La comète 2I / Borisov, photographiée avec le télescope spatial Hubble de la Nasa, une des photos montrant une galaxie (à gauche), est le deuxième objet interstellaire connu pour être entré dans notre Système solaire après le désormais célèbre 'Oumuamua. Une nouvelle analyse de la coma brillante et riche en gaz de Borisov indique que la comète est beaucoup plus riche en monoxyde de carbone qu'en vapeur d'eau, une caractéristique très différente des comètes de notre Système solaire. © Nasa, ESA et D. Jewitt (UCLA)   

    Les astrophysiciens viennent de publier un article dans Nature Astronomy, mais que l'on peut consulter en accès libre sur arXiv, qui exposent les résultats d'observation faites dans le domaine des ultraviolets avec le télescope Hubble dont on va très bientôt fêter les 30 ans de bons et loyaux services dans l'espace. Dans la coma de 2I / Borisov, le halo à peu près sphérique entourant le noyau, est constitué de particules neutres de gaz et de poussières libérées sous forme de jets lorsque la comète se rapproche du soleil, provoquant la sublimation de ses glaces ; l'équipe internationale de chercheurs a découvert avec surprise que le monoxyde de carbone (CO) était au moins 50 % plus abondant que la glace d'eau -- une valeur de plus de trois fois supérieure à la moyenne de toute comète mesurée dans le Système solaire interne. Jusqu'à présent, 2I / Borisov semblait en fait similaire à celles connues de l'humanité.

    « Même si la composition des comètes dans notre Système solaire peut varier considérablement d'une comète à l'autre, nous n'avons jamais vu une comète aussi proche du Soleil avec autant de monoxyde de carbone par rapport à l'eau », a ainsi expliqué Kathleen Mandt, planétologue au Johns Hopkins Applied Physics Laboratory à Laurel, Maryland (USA). Membre de l'équipe derrière la publication sur 2I / Borisov, elle avait utilisé avec ses collègue le spectrographe Cosmic Origins de Hubble pour étudier la comète sur quatre périodes de décembre 2019 à janvier 2020.

    Ce schéma montre la composition des substances volatiles dans la coma de 2I / Borisov par rapport aux comètes de notre Système solaire. Les rapports d'abondances sont montrés par rapport à l'oxygène atomique O pour le carbone, l'azote et le soufre (C,N,S) pour 2I / Borisov, 67P / Churyumov-Gerasimenko et la moyenne des comètes (average comet). © D. Bodewits, J. W. Noonan, P. D. Feldman, M. T. Bannister, D. Farnocchia, W. M. Harris, J.-Y. Li, K. E. Mandt, J. Wm. Parker, Z. Xingde

    Ce schéma montre la composition des substances volatiles dans la coma de 2I / Borisov par rapport aux comètes de notre Système solaire. Les rapports d'abondances sont montrés par rapport à l'oxygène atomique O pour le carbone, l'azote et le soufre (C,N,S) pour 2I / Borisov, 67P / Churyumov-Gerasimenko  et la moyenne des  comètes (average comet). © D. Bodewits, J. W. Noonan, P. D. Feldman, M. T. Bannister, D. Farnocchia, W. M. Harris, J.-Y. Li, K. E. Mandt, J. Wm. Parker, Z. Xingde  

    Une comète née au-delà de la ligne des neiges d'une naine rouge

    Or, il se trouve que le monoxyde de carbone est une molécule extrêmement volatile dont la glace se sublime dans le vide à très basses températures et donc à grande distance du rayonnement d'une étoile. Dans le cas du Système solaire, ce type de glace n'existe qu'à partir d'environ 18 milliards de kilomètres du Soleil -- près de trois fois la distance entre Pluton et le Soleil à son point le plus éloigné. L'eau, en revanche, résiste à la sublimation dans le cas d'une comète jusqu'à ce qu'elle se trouve entre Mars et le bord intérieur de la ceinture d'astéroïdes.

    2I / Borisov doit donc avoir passé beaucoup de temps dans des régions très froides autour d'une étoile mais le fait qu'elle soit devenue un objet interstellaire implique qu'elle a dû passer non très loin d'une planète géante pour que des perturbations gravitationnelles importantes l'éjectent sur une orbite hyperbolique. Or, ce type de planète ne peut pas se former trop loin d'une étoile.

    Il semble que la façon la plus simple et la plus plausible de résoudre la contradiction est de faire naître 2I / Borisov dans l'environnement d'une naine rouge -- ce qui avait déjà été proposé comme Futura l'expliquait dans le précédent article ci-dessous. En effet, on sait que les systèmes planétaires sont plus compacts autour de ces astres moins lumineux que le Soleil et ont donc des régions froides relativement plus proches que celles qui seraient requises pour former un objet comme 2I / Borisov autour de notre étoile hôte. Avec environ la moitié de la masse du Soleil et un dixième de sa luminosité, la ligne de neige au-delà de laquelle de la glace de CO peut se former est en effet 18 fois plus près que dans notre Système solaire.

    N'oublions pas aussi que les naines rouges sont les étoiles les plus nombreuses dans la Voie lactée, ce qui veut dire qu'une comète interstellaire a plus de chance de naître autour de ces astres qu'autour de naines jaunes ressemblant au Soleil. Pour Dennis Bodewits, le principal auteur de l'article de Nature Astronomy, astrophysicien à l'Université Auburn, en Alabama : « Les origines et la formation de nos propres comètes ne sont pas bien comprises. Nous espérons que la différence entre les comètes du Système solaire et les objets futurs comme celui-ci nous aidera à mieux étudier la formation et l'évolution des comètes ».

    Source: https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/objet-interstellaire-comete-interstellaire-borisov-viendrait-etoile-naine-rouge-77905/#utm_content=futura&utm_medium=social&utm_source=facebook.com&utm_campaign=futura